Depuis le 26 avril dernier, le film du réalisateur japonais Hajime Hashimoto s’invite dans les salles obscures françaises.
Synopsis : Japon, XVIIIe siècle. Alors que le pouvoir impérial impose sa censure sur les artistes, le jeune Shunrō, apprenti peintre, est exclu de son école à cause de son tempérament impétueux et du style peu conventionnel de ses estampes. Personnes n’imagine alors qu’il deviendra Hokusai, célèbre auteur de la Grande vague de Kanagawa.
Un biopic en deux temps
Le film met en lumière dans sa première partie la jeunesse de l’artiste. À l’époque surnommé Katsukawa Shunrō (« Splendeur du Printemps ») ses estampes ukiyo-e* ont rapidement impressionné son maître … Mais le jeune prodige n’a jamais voulu rentrer dans les normes. Le film retrace l’époque d’Edo (1603-1868), une période marquée entre autres par la croissance économique du pays et une forte expansion urbaine. Néanmoins, face au pouvoir politique, les auteurs et peintres japonais étaient limités dans leurs expressions artistiques. Ce pourquoi le style atypique de celui qui deviendra Hokusai (« L’étoile polaire qui ne bouge jamais ») posa de sérieuses inquiétudes : Son tempérament tumultueux et autodidacte a entrainé de nombreux désaccords avec le mode de fonctionnement de l’école Katsukawa.
Le film fait par la suite un saut dans le temps. Après avoir entrevu la fougue de la jeunesse d’Hokusai, nous découvrons dans un deuxième temps « le vieux fou du dessin » et les prémices de la peinture de « La Grande Vague de Kanagawa » dévoilée en 1830.
Encore plus perfectionniste qu’à ses débuts, Hokusai est cette fois-ci un vieux monsieur en recherche de sens dans ses peintures après les péripéties qu’il a pu connaître dans sa vie.
« La Vague » a été peinte entre ses 60 et 70 ans, âge où il jugea n’avoir rien produit de bon auparavant. Tirée de sa série d’estampes « Trente-six vues du mont Fuji », le mythique volcan japonais est cette fois-ci relayé au second plan, tant la perspective entre l’éternel immobilisme du mont Fuji et la puissance éphémère de la vague est saisissante.
Non seulement avant-gardiste par sa manière de peindre, Hokusai l’était aussi dans sa philosophie. Alors que ses différentes autres œuvres mises en lumière dans ce film démontrent comment Hokusai illustrait la puissance de l’homme, « La Grande Vague de Kanagawa » est l’estampe où ce dernier apparait le plus fragile : face aux lois de la nature.
« Qu’il y a-t-il de mal à peindre ce que l’on aime ? »
Ce biopic sur celui qui a porté plus de 120 surnoms au cours de sa carrière est même généralement une immersion dans l’ère d’Edo. Ordonnée, colorée… L’ancienne version de Tokyo est mise à l’image sous ses plus beaux angles, avec un sens du montage qui rend le septième art nippon toujours aussi charmant.
Hokusai est présenté comme quelqu’un qui n’a jamais eu peur de peindre ce qu’il aime, quitte à remettre en question l’autorité du shogunat des Tokugawa… Jusqu’à y risquer sa vie ! La peinture et la représentation de la réalité ont toujours été au centre de ses idées.
La Grande Vague de Kanagawa est également réputée au Pays du Soleil-Levant pour avoir popularisé le « bleu de Prusse », pigment originaire de l’Occident et venu au Japon par l’intermédiaires des échanges récurrents avec les Pays-Bas durant l’ère d’Edo.
Différents éléments qui expliquent pourquoi Hokusai méritait un hommage de la sorte, même s’il est impossible de résumer son œuvre en 1h30, tant il a définitivement inspiré la culture populaire.
Par Arnaud Dal-Mas
*Mouvement artistique popularisant l’estampe auprès de la bourgeoisie japonaises.