Arrivés il y a 3 300 ans via le sud de la Sibérie, 1 000 ans avant l’ethnie Yamato, venue de Chine et de Corée, qui représente aujourd’hui la majorité des Japonais, le peuple autochtone et aborigène « aïnou » (アイヌ) vit actuellement dans le nord du pays, principalement sur l’île d’Hokkaidō.
Longtemps contraints par une politique d’assimilation forcée, japonisant leur patronyme, reniant leurs spécificités et la pratique de leur langue, les Aïnous obtiennent la reconnaissance officielle de leur existence en 2008, et espèrent que la loi de 2019 sur le respect de la fierté aïnou réduira les discriminations à leur encontre.

L’histoire des Aïnous, c’est l’histoire de tous les peuples autochtones de la planète, meurtris par des envahisseurs méprisants. Réduit à une part congrue de sa population (environ 25 000 individus), le peuple aïnou déploie à son échelle une énergie bienveillante pour sauver l’âme souveraine d’une humanité multiple et riche de ses différences. Alors, si vous prenez le chemin de la clairvoyance, il vous sera agréable de découvrir la diversité d’une culture singulière, irriguée dans ses rituels, son art et ses prières par un animisme fondateur.
Pour perpétuer les traditions comme un imeruat (en aïnou, « éclair qui illumine ») qui donne la vie, le peuple aïnou déploie sa majesté dans l’évocation de la nature au cours de danses chaloupées par des chorégraphies figuratives. Cadencées par le mukkuri (harpe buccale) et le tonkori (cithare à cinq cordes), les sons enveloppent la scénographie dans l’expression d’un corpus universel unissant l’homme à son environnement.

Les chants rythment le vocable dans des circonvolutions répétitives primordiales, diffusant ce qui fait l’essentiel de la vie, et imprimant la pureté du message. L’histoire d’un peuple s’exprime dans une joyeuse prestation pénétrant les esprits et forgeant une identité forte. Les rituels et les prières impriment le sens profond d’une philosophie de l’existence, gratifiant dans les gestes et les sonorités sa profonde gratitude au vivant, à la nature. Ces enseignements s’apprécient au théâtre de l’Atanko Aïnou Village ou lors du Lyomante Fire Festival, et ouvrent les esprits aux célébrations d’une culture à ne pas oublier.

Cette atmosphère hypnotisante saura sans aucun doute vous entrainer vers les nombreux musées, tel celui au bord du Lac Poroto, pour initier une connaissance du passé aïnou, celui du chasseur-pêcheur-cueilleur, forgeant les outils de pratiques ingénieuses et surannées ; celui d’une communauté qui imprime ses codes sociaux sur des vêtements merveilleusement brodés, et les corps, comme le tatouage labial des femmes ou la longue barbe des hommes l’âge venant ; celui d’un peuple ritualisant ses croyances dans des actes symboliques ; celui d’artisans aux mains habiles pour travailler le bois, tels le fameux plateau ita, ou le textile attu en fibres d’écorce de bois.
Bienvenu en « Terre des Ezo », une terre empreinte de traditions millénaires!
* ikor : trésor
À regarder : Le peuple autochtone du Japon : protéger une identité – YouTube
À écouter : https://youtu.be/DuVSbEItqHQ
Par Léa van Cuyck